jeudi 20 septembre 2018

L’incroyable émergence d’un champion français de l’impression 3D !

Marianne 3D  made in France !
C’est extraordinaire ce qui se passe en France en matière d’impression 3D pour l’industrie. Il y a cinq ans, ce blog déplorait qu’après un rachat américain il ne restât plus en France qu’un tout petit fabricant de machines 3D pour pièces plastiques, Prodways.

En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, tout a changé. Il y a aujourd’hui un fabricant français de machine 3D pour pièces métalliques de taille mondiale et qui vise quelque 10% de ce marché. Il dispose d’une très belle palette de technologies, de services et d’alliances dans les industries aéronautiques et automobile notamment. Il s’appelle Addup.

Pour ceux qui n’ont pas suivi les épisodes il faut se rappeler :
- Qu’Addup est le nouveau nom  de Fives Michelin Additive Solutions créée en 2015 à parité par Michelin et Fives pour proposer des machines et des services pour le 3D métallique.
- Qu’au moment même où se créait cette entreprise, apparaissait un autre français sur le marché avec une très belle technologie de machines de production métalliques, Beam.
- Qu’Addup  a racheté Beam en juin dernier
- Qu’Addup vient tout juste de racheter Polyshape, une brillante entreprise de fabrication de pièces 3D métalliques, notamment pour l’automobile, dont on a abondamment parlé sur ce blog.

C’est incroyable qu’en si peu de temps – au moment précisément ou démarrent les applications dans l’automobile et l’aéronautique – l’industrie française ait réussi à se doter d’un tel « champion national » sans, autant que je sache, beaucoup d’intervention de l’Etat.

Incroyable ? Peut-être pas. Cela prouve en effet que dans des domaines où l’on possède une industrie forte – automobile au sens large, aéronautique, ingénierie -  et où l’on dispose de technologies performantes, il est possible de voir émerger des start-up qui profitent du soutien et de l’intérêt des industries établies pour croître et… finir dans le giron de grandes entreprises nationales.

C’est tout l’inverse du numérique où, faute de grands acteurs nationaux (malgré l’ex Bull et malgré tout ce qu’on demande à Orange…), la maîtrise avérée des technologies ne conduit (sauf de rares exceptions) qu’à créer des très belles start-up qui terminent plus souvent qu’à leur tour leur carrière au sein d’un géant étranger, américain en général…

Autant on peut se réjouir du parcours d’Addup, autant ce constat est accablant. Le cercle, vertueux dans un cas, est terriblement vicieux dans l’autre…

jeudi 6 septembre 2018

Production des Tesla Model 3 : l’échec était assuré...


Tesla Model 3 : trop de robots tue les robots...
En 2016, Elon Musk, patron de Tesla annonçait qu’il allait produire dès le second semestre 2017 des Model 3 à très grande cadence et devenir le meilleur constructeur automobile du monde en osant ce que ses concurrents timorés n’avaient pas mis en œuvre : une production hyper automatisée qui changerait à jamais la donne de l’industrie automobile.

Beaucoup, dont ses investisseurs, y ont cru. Pas tout le monde. Pas moi. Il suffisait pour cela de savoir ce qui a fait le succès (inattendu) de Space X, sa firme de fusées, et de connaitre un peu l’industrie automobile. Dans ce cas, l’échec, aujourd'hui avéré, du pari de Musk était évident.

Quelles sont les raisons du succès de Space X ? On l’a compris après coup : Musk s’attaquait alors à une industrie peu concurrentielle, dominée par des agences étatiques endormies sur leurs lauriers et aux process figés. Pas question pour elles de prendre le risque d’innover en réévaluant des modus operandi donnant satisfaction depuis des lustres. 

 Space X en a profité. L’entreprise a revu et modernisé de fonds en combles la conception/fabrication des fusées, réussissant à innover profondément  tout en baissant radicalement les coûts.

 Le tsunami Space X a pris l’industrie spatiale de court, à la façon dont à la fin des années 70 les constructeurs d’automobiles ont subi la déferlante japonaise. Et c’est précisément pour cela que le pari de production de Tesla ne pouvait être gagné. Secouée par le Japon, l’industrie automobile –hyper concurrentielle, elle – s’est en effet attelée depuis plus de trente ans à améliorer et à optimiser sans relâche ses processus de conception/production. Elle a tout essayé et, en particulier, au milieu des années 80, s’est adonnée à l’hyper automatisation qui s’est révélée un échec. On a alors parlé de l’erreur de l’«automatisation à outrance ». C’est dire.

Le niveau de savoir-faire en conception/production de cette industrie est devenu tel que, même avec la meilleure volonté du monde, les meilleurs ingénieurs, les technologies les plus pointues et des montagnes de dollars – les ingrédients de Musk- il était impossible de faire beaucoup mieux que l’état de l’art, qui, de plus, évolue perpétuellement

Le patron de Tesla  a alors découvert que ce n’est pas par timidité que  les constructeurs n’ont pas joué la carte de l’hyper automatisation. Ce choix est tout bonnement le fruit de leur expérience : ils savent parfaitement ce qui, à un moment donné,  est automatisable et ce qui ne l’est pas.  Mieux, ils sont capables d’adapter le niveau d’automatisation en fonction des volumes et des caractéristiques des modèles produits.

Bref, l’industrie automobile n’est pas l’industrie spatiale et ce qui a fonctionné ici ne pouvait pas faire recette là. Elon Musk l’a découvert à ses dépens et n’a d’ailleurs pas été long à reconnaître qu’automatiser et robotiser toutes les opérations était stupide et contre-productif

Cela dit, aussi cuisant soit cet échec, il faut en retenir deux choses. Primo, l’extraordinaire capacité de réaction de Musk qui, en un temps record, a construit – sous une tente !- une unité de production efficace qui lui a permis d’atteindre – certes avec beaucoup de retard – les volumes envisagés.

Secundo, en franchissant allègrement les frontières du raisonnable, Musk et ses ingénieurs auront certainement beaucoup appris en matière de  process de production. Ils auront probablement repoussé certaines limites que les constructeurs classiques, non pas timorés mais prudents,  ne peuvent découvrir. A quelque chose malheur est bon…