vendredi 21 décembre 2012

Big Data : la very very Big vision stratégique de General Electric

J'ai beaucoup de choses à dire !
General Electric ne lésine pas. Pour l’entreprise américaine cela ne fait pas de doute : nous sommes sur le point de connaître la troisième grande vague d’innovation et de changement de l’industrie. La première a été le Révolution industrielle ; la deuxième la Révolution Internet. La troisième est celle qu’il a baptisé « Industrial Internet ».

Pour faire de cette vision une réalité GE investira 1,5 milliard de dollars de R&D sur 3 ans, en particulier dans son flambant neuf centre de R&D en logiciel de San Ramon, en  Californie.

Pour évangéliser les foules et faire partager sa vision, l’entreprise vient également de publier (le 26 novembre dernier) un très riche document de pas moins de 37 pages expliquant point par point ce qu’est cet Internet Industriel et pourquoi il va tout révolutionner : Industrial Internet – Pushing the Boundaries of Minds and Machines. Il vous dira tout.

Conceptuellement l’idée est assez simple. GE imagine qu’en bourrant de capteurs ses équipements – par exemple ses moteurs d’avion –  il récupérera un déluge d’information que les technologies dite « big data » lui permettront de traiter efficacement. Le tout pour prendre  des décisions propres à rendre les produits plus efficaces (prévenir les pannes, optimiser la maintenance, économiser l’énergie…). Et pas seulement les produits individuels mais également l’ensemble du système dans lequel ils sont insérés (une usine, une flotte d’avion, un aéroport…)

L’idée qui en réalité n’est pas vraiment nouvelle prend toutefois tout son sens aujourd’hui puisque la capacité de traitement du moindre PC est colossale, le prix des capteurs en chute libre et les outils du Big Data permettant de traiter des Everest de données en train de se développer.

Il reste cependant encore beaucoup de recherche à effectuer pour rendre l’ensemble vraiment opérationnel. C’est une chose de conseiller un livre à un acheter comme le fait amazon en traitant les données dont il dispose. C’est un peu plus compliqué d’indiquer de façon fiable à un avionneur qu’il doit prévoir la maintenance des moteurs de tel ou tel avion. Et c’est bien pour cela que GE investit tant dans le logiciel.

Tout cela s’applique  en tout cas très bien aux produits que fabrique GE : des moteurs d’avions, des locomotives, des machines d’IRM et ses systèmes de production d’énergie (turbines…)

 Pour situer les enjeux, GE indique dans son document qu’il y a grosso modo 43000 réacteurs d’avion en activité (et 30000 nouveaux d’ici à 15 ans) et qu’ au moins trois grandes pièces tournantes peuvent être instrumentées pour suivre le moteur en temps réel.  Anil Varma, chercheur du labo de San Ramon (cité par Technology Review) souligne ainsi que ces moteurs auraient le potentiel de produire en un an « davantage de données que celles collectées par GE depuis qu’il est dans le métier de l’aviation. »

Pour GE, le traitement peut s’appliquer à la plupart de produits qu’il fabrique et dans son document sur l’Internet Industriel, il estime qu’il y a aujourd’hui au moins « trois millions de ‘choses qui tournent’ qui pourraient être instrumentées de la sorte. » C’est donc bien d’un déluge de données qu’il est question ! Mais aujourd’hui, avec les technologies de Big Data, le déluge n’effraie plus personne…

A Lire
 Industrial Internet – Pushing the Boundaries of Minds and Machines

mercredi 19 décembre 2012

L’avenir du manufacturing selon Mac Kinsey : compétitivité oui, emploi non

L'atout du manufacturing : l'innovation, pas l'emploi
Voici une récente (novembre 2012) et copieuse (170 pages) étude consacrée au manufacturing. Elle est réalisée par Mac Kinsey Global Institute (MGI). Son titre, Manufacturing the Future : The Next Era of Global Growth and Innovation, indique clairement son ambition: analyser le rôle du manufacturing dans l’économie mondiale et imaginer son futur à l’horizon d’une décennie. Bonne idée.

Parmi les informations les plus significatives celle-ci : il faut faire son deuil de l’industrie comme grand pourvoyeur d’emploi. Elle restera une source d’innovation, de productivité et de compétitivité mais plus le créateur d’emplois qu’elle a été.

Parmi ses recommandations, celle-ci, dont elle fait une priorité absolue : le développement de l’éducation et des compétences.

L’étude développe trois idées fortes :

1- Le rôle du manufacturing dans l’économie change 
En particulier le manufacturing comprend une part de plus en plus importante de services. Par exemple aux Etats-Unis chaque dollar de production réclame 19 cent de services et dans de nombreuses industries, les emplois du type « service » représentent jusqu’à la moitié des effectifs

Second changement : comme déjà signalé si le manufacturing continuera à être source indispensable de croissance et de richesse, il ne faut plus trop compter sur lui pour fournir de nombreux emplois. Son point fort reste le fait que la production manufacturière représente 77% de toutes les exportations (chiffre 2010). Et qu’elle pèse 70% de la R&D privée (2006)

L’étude montre enfin que la production manufacturière dans le monde continue de croître. Elle pèse 16% du PNB mondial et 14% de l’emploi. Mais le rapport montre qu’en réalité, la part du manufacturing est très variable selon l’état de développement des pays. Quand les économies s’industrialisent, sa part croît fortement jusqu’à atteindre 20 à 35% du PNB. Puis… elle décroit. Explication : à mesure que les travailleurs s’enrichissent ils consomment davantage de services, ce qui développe ce secteur d’activité.

2- Le manufacturing n’est pas monolithique 
MGI a réparti les activités de production manufacturières en cinq grandes catégories qui offrent des profils très tranchés et qui réclament des traitements et des stratégies bien différents

-Les entreprises du groupe « Global innovation for local market » (chimie, transports, machines…) représentent 34% de la valeur ajoutée mondiale du manufacturing (et 30% des emplois).
- Le groupe « regional processing » (pastique et caoutchouc, boissons, tabac, imprimerie…) se place en second avec 28% de la valeur ajoutée (et 37% des emplois).
- Le groupe « Energie et/ou commodités à fort contenu en ressources » (bois, pétrole, papier…) compte pour 22% de la valeur ajoutée (et 13% des emplois) .
- Le groupe « Technologies globales/Innovateurs »  (semiconducteurs, ordinateurs, médical…) pèse 9% de la valeur ajoutée (et 8% des emplois)..
-Le groupe « produits à fort contenu en main d’œuvre » ne représente lui que 7% de la valeur ajoutée (et 12% des emplois).

3- Le manufacturing  entre dans une nouvelle dynamique
Mc Kinsey identifie quatre tendances à l’horizon 2025:

- La majorité de la consommation sera le fait des économies en développement ce qui créera de belles opportunités de marché
- Dans les marchés traditionnels la demande sera plus fragmentée avec des offres plus variées et comportant davantage d’après vente et de services
- Un riche pipe line d’innovation - des nano matériaux à l’impression 3D en passant par la robotique -  promet de créer de nouveaux types de demande et d’augmenter encore les gains de productivité dans tous les domaines de la production.
- L’environnement économique continuera toutefois d’être extrêmement incertain et en tout cas moins bon qu’il ne l’était avant la récente crise.

A lire
L’executive summary (16 pages)
Le rapport complet (170 pages)

jeudi 13 décembre 2012

Des Mac et des PC fabriqués aux Etats-Unis : la production électronique en Chine n’est plus la panacée !

Made in USA ?
Surprise. Grosse surprise ! Le 4 décembre dernier, Tim Cook, le patron d’Apple a annoncé que son entreprise allait investir 100 millions de dollars pour… la production de Mac Intosh aux Etats-Unis ! Incroyable mais vrai. Et d’autant plus étonnant qu’il y a tout juste un an, feu Steve Jobs répondait à Barack Obama qu’il était hors de question qu’Apple produise à nouveau sur le territoire américain…

Tim Cook n’a pas été très disert, se contentant de dire que la production des Mac pourrait se faire avec un partenaire. N’empêche, c’est une annonce extrêmement significative. Elle l’est d’autant plus qu’elle n’est pas isolée.

Ainsi, il se murmure depuis peu que Foxconn, le géant taïwanais rendu célèbre par la production des produits d’Apple en Chine, étudierait l’opportunité d’une implantation… aux Etats-Unis ! Selon le site taïwanais DigiTimes, à l’origine de cette information, l’installation dans des villes comme Detroit ou Los Angeles serait étudiée, probablement « pour la production de téléviseurs à écran plat » imagine Digitimes.

Ce n’est qu’une rumeur, mais plusieurs autres événements mettent en lumière le fait que la Chine n’est peut être plus la panacée pour la fabrication de produits électroniques.

L’un de ces événements est l’annonce en octobre dernier par le chinois Lenovo, le second fabricant mondial de PC, de l’ouverture prochaine d’une usine de montage de micro ordinateurs en Caroline du Nord. Cette nouvelle est d’autant plus piquante que, pour ceux qui s’en souviennent, Lenovo est l’entreprise qui en 2005 a repris l’activité micro ordinateurs d’IBM.

Selon son patron, Lenovo a choisi de s’installer aux Etats-Unis car, dit-il, « nous croyons à la solidité du marché américain de la micro informatique et que nous pensons qu’il nous offre de bonnes opportunités de croissance ».

Un autre raison, est avancée. En produisant sur le sol américain l’entreprise chinoise pense qu’elle pourra se montrer plus réactive pour répondre aux demandes des utilisateurs locaux. Il faut en théorie une dizaine de jours pour qu’un PC fabriqué en Chine atteigne le consommateur américain. Dans les faits c’est plutôt une affaire de semaines.

Au delà de ce discours convenu, il n’est pas interdit non plus de voir  dans cette annonce une opération de séduction des pouvoirs publics et des consommateurs à l’heure ou le « made in America » est devenu un enjeu politique.

Dans les faits la portée réelle de l’implantation de Lenovo reste limitée. Après tout, même si l’usine est appelée à croître elle ne créera dans un premier temps que 115 emplois. Surtout, elle n’est qu’un site d’assemblage : tous les composants des PC fabriqués en Caroline du Nord viendront d’Asie.

Mais un autre évènement vient toutefois confirmer ce mouvement. Juste avant son annonce choc d’une production aux Etats-Unis, le même Lenovo avait en effet également décidé d’investir dans une unité de production de PC au Brésil pour profiter de ce vaste marché. Et puisqu’il est question du Brésil, il faut également se souvenir  Foxconn lui aussi a ouvert une usine de production d’iPhone et d’iPad  dans ce pays. Dans ce cas, la motivation de ces installations est liée aux droits de douanes que le Brésil agite comme un épouvantail.

Ce grand vent d’annonces marque-t-il le début d’une renaissance de la production électronique aux Etats-Unis ? Peut être, mais il faut se montrer prudent. Il faut savoir en effet que dans tous les cas, la quasi totalité des composants des PC et autres iPhone vient d’Asie. Il est donc loin d’être évident qu’avec un supply chain entièrement asiatique, la production en volume aux Etats-Unis redevienne rapidement la norme.