Le prochain ministre de l'Industrie ? |
Alain Rousset en a l’étoffe. Depuis 1998, il mène en Aquitaine une politique soutenue d’aide à la recherche et au développement industriel. La région Aquitaine est ainsi celle qui consacre la plus large part de son budget à la recherche, l’enseignement supérieur et au transfert de technologie : plus de 10 % du budget régional soit plus de 130 millions d’euros en 2011. Cette politique se traduit par de belles réussites en particulier dans le domaine de la santé, des lasers et des matériaux de pointe.
Franck Barnu. Quel rôle pour l’état en matière de politique industrielle ?
Alain Rousset. Nous vivons sur l’acquis de stratégies qui ont été définies il y trente ans ou plus ! Aujourd’hui, l’état a perdu sa compétence en matière d’intelligence économique. Il doit absolument retrouver cette compétence et ce faisant retrouver son rôle de stratège. Il est indispensable de définir clairement - avec les grands groupes, avec les filières industrielles, avec la recherche…- quelles sont nos priorités en matière de recherche et d’industrie. Nous ne sommes pas les Etats-Unis. Nous ne pouvons pas être présent partout. Il faut faire des choix.
Je vois ainsi de nombreux pays, dont les Etats-Unis, miser par exemple sur la recherche en matière de stockage d’énergie, technologie clé pour le développement des énergies renouvelables. En France, l’état reste coi. Même attentisme sur les drones, au point que j’ai fini par décider de créer une filière d’excellence en Aquitaine. Et quels sont les choix de la France en matière de robotique, de biotechnologies, etc. ?
Les technologies d’aujourd’hui sont les usines de demain. Il faut savoir où nous voulons aller.
FB. Il y a pourtant en France les investissements d’avenir, les pôles de compétitivité, etc.
AR. En effet, mais cela ne constitue pas une stratégie. L’état se contente d’aller « à la pêche ». Il met en concurrence et sélectionne les projets, ceux qui remontent des régions notamment, mais ces choix ne sont pas fondés sur une réelle stratégie.
Cela est d’autant plus vrai que tout le processus est géré par des agences. Ce n’est ni directement l’état, ni les régions d’ailleurs, qui sont responsables de ces choix.
FB. Les régions, justement, quel rôle ont –elles à jouer ?
AR. Je pense qu’en matière d’industrie, il y a deux sujets au moins qui doivent être placés sous la responsabilité des régions.
Le premier est l’aide aux PME. Pour avoir une action efficace en la matière, il est important d’être au plus près de ces entreprises et d’agir dans la durée. C’est sans aucun doute la Région qui est le mieux placée pour le faire et aider les PME à se développer pour devenir ces ETI [entreprises de taille intermédiaire] qui font le succès de l’Allemagne.
Pour les mêmes raisons, le travail à effectuer pour décloisonner la recherche, l’enseignement et l’industrie doit également être du ressort des régions.
Il va sans dire que pour que les régions mènent à bien ces actions, il faut les responsabiliser et leur donner les moyens de leurs ambitions. En tant que président du conseil régional d’Aquitaine, je regarde toujours avec envie les länders allemands, voire les régions espagnoles, qui en matière de recherche et d’innovation ont une force de frappe incomparable avec la nôtre…
Alain Rousset, mini bio
- 61 ans le 16 février prochain
- Il conduit actuellement son troisième mandat en tant que président du Conseil régional d’Aquitaine, le premier datant de 1998.
- Il est également président de l’Association des Régions de France, depuis 2004 et, depuis 1989, président de la Cité scientifique et technologique de Pessac Bordeaux-Unitec qu’il a co-créée en 1989.
On peut le suivre sur son blog : alainrousset.net
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