La notion de « filière » fait florès. Depuis janvier dernier, quatorze « filières industrielles stratégiques » destinées à « construire la carte de la France productive des années 2020 » et à mettre fin à la désindustrialisation de notre pays ont été mises en place par le gouvernement. C’est bien. Mais que recouvre au juste le terme de filière et cette notion est-elle la plus appropriée pour servir de base à une politique industrielle ?
C’est La Fabrique de l’Industrie, le think tank de Louis Gallois, qui pose la question dans un petit livre fort pertinent intitulé tout simplement « A Quoi Servent les Filières ? »
L’ouvrage écrit par Thibaut Bidet-Mayer et Louisa Toubal n’apporte pas de réponse définitive. Il pose le problème et souligne surtout que la notion même de « filière » n’est pas aussi évidente qu’elle ne le paraît à première vue. Ils indiquent même que cette idée « assez intuitive pour être rassembleuse » est en réalité « une notion assez floue, parfois même galvaudée, qui ne fait pas l’unanimité parmi les économistes. »
Ils posent en particulier la question du risque de cantonner l’action politique dans un cadre trop restreint, voire dépassé, et s’interrogent sur le danger d’exclusion des entreprises multi-filières ou de celles pratiquant des fertilisations croisées dans le cadre des pôles de compétitivité par exemple.
Surtout, ils rappellent que si l’industrie allemande – « le » modèle indépassable… - fonctionne bel et bien en termes de filières, la politique industrielle allemande, elle, ignore purement et simplement ce concept et privilégie une approche horizontale.
Le livre est organisé en cinq chapitres et pour alimenter le débat, les auteurs ont eu la bonne idée à la fin de chacun des chapitres de présenter les commentaires et le point de vue d’un ou plusieurs économistes.
Une réflexion bien venue qui permet de clarifier l’idée de filière et, surtout, d’avertir « qu’une utilisation abusive de concept pourrait amener à envisager l’action politique dans un cadre trop restrictif au regard des objectifs qui lui sont assignés. »
Le livre est vendu 22 euros, mais si vous voulez le lire sans bourse délier, il suffit de... le télécharger