Et maintenant brisons les ordinateurs ! |
Ces idées commencent à avoir un écho certain aux Etats-Unis. Leur fondement est le suivant : avec les fulgurants progrès du numérique, nous sommes désormais entrés dans une phase de formidable explosion de l’automatisation qui ne touche plus seulement l’industrie mais menace désormais quasiment tous les emplois de service et les tâches intellectuelles. L’impact sur l’emploi va être absolument dévastateur !
Cette inquiétude se nourrit en outre de la logique suivante : si les ordinateurs et le logiciel remplacent les humains dans les emplois de service, il n’y a désormais plus d’issue. L’automatisation de l’agriculture, avait conduit les travailleurs vers l’industrie puis celle de l’industrie vers les services. L’automatisation des services sonne donc le glas du travail. Il n’y a en effet plus d’échappatoire. Nowhere to go.
Parmi ceux qui ont conduit à populariser cette idée d’automatisation galopante, deux responsables du MIT Center for Digital Business, Erik Brynjolfsson et Andrew Mac Afee. Dans le livre Race Against The Machine, ils décrivent le développement exponentiel de l’automatisation à venir. Ils n’annoncent cependant pas « la fin du travail », mais une dure période de transition avant que le numérique ne crée une nouvelle abondance. Mais beaucoup se sont emparés de cette idée pour décréter que l’emploi, c’est fini !
Le développement du numérique inquiète également des vrais « geeks ». Témoin Jaron Lanier, visionnaire d’Internet et pionnier américain de la Réalité Virtuelle. Dans son récent livre « Who owns The Future ? » il voit une autre très sérieuse menace dans cette technologie. Il constate - à juste titre - que l’usage des services gratuits sur Internet s’accompagne du développement d’un « travail gratuit » : toutes les données que les utilisateurs fournissent volens nolens. Les données de navigation de tout un chacun mais aussi les articles gratuits des blogs, la musique sur You Tube… Ils ne rémunèrent pas leurs auteurs mais, en revanche, enrichissent considérablement les quelques très grandes entreprises, Google et autres Facebook, qui en profitent. Pour lui, à mesure que davantage d’activités seront numérisées - « sofware mediated » dit-il - le phénomène va empirer, jusqu’à… détruire la classe moyenne. Bigre !
Dans ce contexte le think tank américain ITIF (Information technology and innovation foundation) vient de réagir avec une étude qui prend le contrepied des thèses des « néo-Luddites ». Dans ce document, « Are Robots Taking Our Jobs, or Making Them ? », l’ITIF défend vigoureusement la thèse de l’automatisation source de richesses - et donc créatrice d’emploi -, met à mal la notion de « nowhere to go », jugée « absurde », et milite pour un développement sans frein des machines.
Bref, le bon vieux débat sur l’impact de l’automatisation – est–elle globalement créatrice d’emplois ou l’inverse ? – est désormais bien relancé, en version numérique cette fois.
Cela dit, on se rappellera que si d’un point de vue économique les Luddites avaient tort de s’opposer au développement des machines, en réalité ces mêmes machines ont bel et bien fait perdre leur travail aux protestaires. Comme quoi l’important dans la « destruction créatrice » schumpétérienne est avant tout d’être du bon côté du manche…
Liens utiles
Lire l’article sur le livre d Erik Brynjolfsson et Andrew Mac Afee « Race Against The Machine » sur le site de La Fabrique de l’Industrie
Lire l’article sur le livre de Jaron Lanier « Who Owns the Future ? » sur le site de La Fabrique de l’Industrie
Lire l’article sur l’étude de l’ITIF « Are Robots Taking Our Jobs, or Making Them ? » sur le site de la Fabrique de l’Industrie
Lire l’étude de l’ITIF « Are Robots Taking Our Jobs, or Making Them ? »
Bonjour,
RépondreSupprimermerci pour la référence. Je signale également ce papier très récent : http://www.epi.org/publication/technology-inequality-dont-blame-the-robots/
Je ne l'ai pas lu mais ça a l'air intéressant !
Ce papier est en effet intéressant. Merci à mon tour pour cette info.
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