Robert Atkinson : "les experts ne saisissent pas ce que fait la Chine" |
Que la Chine ait l’ambition d’abandonner le modèle de production à bas coût pour dominer à terme le monde des high tech ne fait aucun doute. Elle n’en fait d’ailleurs pas mystère puisque c’était déjà l’objet de son 11è plan quinquennal. Le 12è qui vient de démarrer renforce encore l’accent mis sur la high tech et consacrera pas moins de… 1500 milliards de dollars sur 5 ans au développement d’industries stratégiques émergentes ! !
Robert D. Atkinson pose alors la question clé : doit-on s’alarmer de cette ambition de dominer le monde des high-tech ?
La question n’est pas de pure forme car, dit Atkinson, aux Etats-Unis, la plupart des experts doutent que la Chine puisse parvenir à ses fins dans le domaine de l’innovation et des high tech. Ils pensent que faute d’adopter le modèle américain (libéralisme, démocratie, liberté de parole…) aucune nation, et donc la Chine encore moins que les autres, ne peut innover significativement. Bref, pensent ces optimistes, les Etats-Unis resteront encore longtemps intouchables en matière d’innovation quels que soient les efforts chinois.
Robert D. Atkinson apporte trois bémols à cette confiance dans la vertu du système américain d’innovation. Il dit ainsi :
- Même si les entreprises chinoises ne deviennent pas des leaders en apportant des innovations radicalement nouvelles, l’économie chinoise peut toutefois s’imposer comme leader de l’innovation si elle mène une politique telle que les multinationales implantent de plus en plus d’activités innovantes dans ce pays
- Même si la Chine ne crée pas d’innovations radicales les entreprises chinoises ont la possibilité de devenir des « fast followers », spécialement dans le domaine des innovations basées sur l’ingénierie, domaine où elle possède de réels atouts
- Même si la Chine ne parvient pas à devenir une économie basée sur l’innovation, sa politique mercantiliste basée sur l’innovation peut continuer à faire beaucoup de mal aux entreprises américaines de technologie et à son économie d’innovation.
Bref, conclut Robert D. Atkinson « c’est à ses risques et périls que l’Amérique continuerait d’ignorer la volonté d’innovation de la Chine ».
Au-delà ce cette constatation, il pense en outre que les économistes américains sont aveuglés par leur croyance dans l’économie marché et ne saisissent pas ce que fait la Chine. Pour eux, s’appuyant sur les thèses de Ricardo concernant le libre échange, la politique économique consiste a améliorer le niveau de vie des consommateurs en laissant le marché distribuer la production de biens de service de façon la plus efficace au sein de marchés bien définis et protégés juridiquement.
Autrement dit chaque pays doit jouer à fond ce qui fait son avantage comparatif. Ces ricardiens jugent ainsi que si la Chine est assez folle pour financer le domaine high tech où elle ne possède aucun avantage, cela se retournera contre elle. Seulement, avertit Atkinson, la Chine ne joue pas ce jeu et n’adopte pas les mêmes règles. D’où le véritable danger…
Lire le rapport « Assessing China’s Efforts to Become an Innovation Society- A Progress Report » (9 pages)
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